Offrir le récit de leur vie à vos parents ou grands-parents ? Très séduisante, cette idée. Difficile de faire un cadeau plus personnel et plus original ! Oui, mais c’est d’abord votre idée, pas forcément la leur. Leur avez-vous demandé leur avis avant de leur faire la surprise ? Seront-ils partants pour dévoiler leur vie, même à la famille proche ? Accepteront-ils de se retourner sur un passé peut-être douloureux ? Bref, auront-ils tout simplement envie de recevoir ce cadeau ? Pas si sûr ……
Beaucoup plus qu’un simple cadeau !
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Un cadeau original
Ce genre de cadeau ne s’offre pas tous les jours, il est encore très peu répandu, tout simplement parce que les gens n’y pensent pas. Vous risquez d’étonner vos parents ou grands-parents. Effet de surprise garanti !
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Un cadeau très personnel
Une chose est sûre, c’est du sur-mesure, il n’y aura pas deux livres comme celui-là à des milliers de kilomètres à la ronde. Histoire unique, cadeau unique ! Rien à voir avec le pull ou la cravate qu’on risque de retrouver sur le voisin ou la voisine.
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Un cadeau durable.
Tout simplement parce que ce livre traversera des générations et pourra captiver des dizaines de petits-enfants et d’arrière-petits-enfants. Rien à voir avec le téléviseur grand écran ou le super ordinateur qui finira à la déchèterie au bout de quelques années, ou même la croisière en Méditerranée qui ne sera plus qu’un lointain souvenir.
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Un cadeau à partager !
Un cadeau qu’on ne garde pas pour soi, mais qu’on partage avec toute la famille, petits et grands, et pourquoi pas les amis ! Un cadeau qui passe de main en main …
- Bien plus qu’un cadeau, une grande marque d’affection ….
Un message d’amour que vous adresserez à vos parents ou grands-parents. En leur offrant ce cadeau, vous les valoriserez par l’intérêt que vous leur portez.
Oui, mais pas aussi simple à réaliser …
Dans certains cas, il y a toute une série d’obstacles que vous devrez lever. Vous risquez de vous heurter à certaines réticences bien compréhensibles.
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Difficulté à livrer des choses très personnelles
Nous n’avons pas tous le désir de livrer certains aspects de notre vie, même à nos proches, surtout pour en faire un livre. Pour certaines personnes, cela relève de l’ « intime » et elles ne souhaitent pas le partager.
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Réticence à se retourner sur un passé difficile
Si certaines personnes acceptent volontiers de se retourner sur un passé douloureux, de le mettre noir sur blanc, allant même jusqu’à y voir une thérapie, d’autres se sentiront déstabilisés par une telle démarche.
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Crainte de ne pas être à la hauteur
Certaines personnes auront tout simplement le sentiment de ne rien avoir d’intéressant à raconter, d’avoir eu une vie banale, sans relief, bref une histoire qui ne mérite certainement pas un livre.
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Peur de l’inconnu
Devenir auteur d’un livre, cela ne s’improvise pas, surtout quand il s’agit du récit de sa propre vie. Et puis, il y a tout un chemin à parcourir, des étapes à franchir, même si le biographe est là pour faciliter cette démarche. Il peut y avoir aussi la crainte d’affronter ses futurs lecteurs, de ce qu’ils vont penser.
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Réticence à se confier à un biographe
Pas évident pour certains de raconter des choses parfois très personnelles à un inconnu, en l’occurrence le biographe si on lui fait appel pour l’écriture du récit. Pourtant, à contrario, d’autres se sentiront beaucoup plus à l’aise avec une personne extérieure à la famille. Une donnée à prendre en considération.
Alors, comment les convaincre sans leur forcer la main ?
Bien sûr, je ne parle pas des grands-parents qui sont intarissables dans le récit de leurs souvenirs et qu’on ne peut plus arrêter. Ceux-là seront tout de suite acquis à votre cause et votre cadeau aura un franc succès.
Je parle des autres, ceux qui sont moins bavards, si discrets que vous ignorez tout de leur vie passée. Dans ce cas, il est préférable de ne pas débarquer en fanfare en annonçant que vous allez leur faire un merveilleux cadeau, le livre de leur vie ! Vous risqueriez de les heurter. Approchez-vous doucement, sur la pointe des pieds, testez d’abord votre idée de cadeau en les faisant parler de leur passé, de leur histoire. S’ils accrochent, c’est bon signe. S’ils changent rapidement de sujet pour parler du climat, alors vous saurez à quoi vous en tenir. Faite ce test sans préjugés, sans à priori, car vous pouvez avoir des surprises et un grand-père qui vous semblait lointain et plutôt renfermé peut devenir intarissable à partir du moment où vous vous intéressez à lui.
- S’ils ne souhaitent pas se retourner sur un passé douloureux ou se livrer de façon trop intime, dîtes-leur qu’ils ont l’entière liberté du contenu. C’est eux qui choisissent de raconter ce qu’ils souhaitent. On peut tout à fait imaginer un livre qui ne contiendrait que de beaux souvenirs ! Ce sont eux les auteurs et ils restent maîtres de leurs écrits. En aucun cas, il ne s’agit d’un catalogue où chaque souvenir doit être consigné impérativement.
- S’ils pensent ne rien avoir à raconter, démontrez-leur le contraire, ne serait-ce qu’en évoquant avec eux quelques souvenirs que vous avez en commun. Vous serez surpris de voir que leur langue se délie et ils seront eux-mêmes étonnés de tout ce qu’ils auront à dire.
- S’ils ont peur de l’inconnu, il vous faudra prendre le temps de bien leur expliquer le processus de l’écriture, la façon dont se dérouleront les entretiens et les différentes étapes qui conduiront à la réalisation du livre. Lorsqu’on ne connait pas, on a tendance à imaginer une situation plus difficile que dans la réalité. Si vous faites appel à un biographe, demandez-lui de vous accompagner dans cette démarche qui consiste à informer et à rassurer.
- S’ils ne souhaitent pas raconter leur vie à une personne qu’ils ne connaissent pas, en l’occurrence le biographe, un membre de la famille avec lequel ils se sentiront en confiance pourra enregistrer leur récit avec un enregistreur numérique (il y en a de très bon marché) et confier ensuite l’enregistrement à un biographe. Il m’est aussi arrivé de travailler à partir d’un enregistrement qu’une personne avait réalisé elle-même en racontant sa vie dans le micro.
Respecter avant tout leur désir
- Si malgré vos arguments, vous n’arrivez pas à convaincre vos parents ou grands-parents d’écrire leurs mémoires, respectez leur désir. Sinon ce serait comme offrir un saut à l’élastique à une grand-mère de 92 ans ! De toute manière, il ne servirait à rien de leur forcer la main, ce serait au détriment de la qualité.
- Abandonnez également ce projet, s’ils acceptent de se livrer à cet exercice uniquement pour vous faire plaisir. Pour mener à bien l’écriture de sa vie, un acquiescement du bout des lèvres ne suffit pas. Cette démarche nécessite un véritable engagement non pas sur quelques jours mais sur plusieurs mois. L’auteur contraint et forcé risquerait de se lasser avant l’échéance. Je parle en connaissance de cause. Il m’est arrivé d’avoir comme clients des enfants remplis des meilleures intentions du monde mais qui, croyant bien faire, avaient un peu forcé la main de leurs parents. Résultat : les entretiens étaient toujours repoussés quand ils n’étaient pas carrément annulés. Si par un heureux hasard, j’arrivais à avoir un entretien, les souvenirs avaient du mal à émerger et l’écriture devenait laborieuse. Bien sûr, cela reste exceptionnel.
- Heureusement, la grande majorité des parents ou grands-parents sont ravis par cette idée de cadeau et l’écriture de leur biographie se passe très bien, car ils sont très motivés, parfois encore plus que leurs propres enfants. C’est d’ailleurs une pratique qui tend à se répandre, et pour ma part, je suis régulièrement sollicité par des enfants qui souhaitent se regrouper pour offrir ce cadeau à leurs parents ou grands-parents.
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je pense que c’est difficile de recevoir ce cadeau. Pour écrire ou faire écrire ses mémoires, il faut être prêt à se retourner, à faire resurgir des évènements douloureux, il y en a forcément, prêt à partager aussi. Les enfants sont-ils prêts eux aussi à recevoir ce récit sans juger ? je sais pour avoir écrit mes mémoires que le cerveau est tout entier tourné vers ce récit, pendant des semaines, des mois, ça m’a pris deux années pour réaliser ce livre, et pour l’instant je le garde pour moi, je ne me sens pas encore prête à le partager.. alors offrir oui mais en en ayant d’abord parlé et en évitant soigneusement les : alors t’en es où ??
Bonjour,
Oui, vous soulevez une question intéressante que je n’ai pas abordée dans l’article : Les enfants sont-ils prêts eux aussi à recevoir ce récit sans juger ?
Après la lecture de la biographie, ils peuvent être surpris par certaines révélations ou certains faits. Comment vont-ils réagir ? Il faut espérer que le récit de vie aide le lecteur et l’auteur à encore mieux se comprendre et à se rapprocher si besoin en était.
A bientôt et merci pour votre participation au blog.
Patrick
La biographie, à mon sens, ça n’est pas la vérité vraie, mais simplement le ressenti d’une personne sur des évènements, sur ce qu’elle a vécu. A partir de là, il n’y a pas de jugement à avoir puisque c’est ce qu’elle ressent. Dit comme ça, ça semble facile, mais on a tous notre propre ressenti face aux évènements de la vie … Pour autant certains sujets restent difficiles à aborder, et on peut prendre le risque de rester dans le « superficiel » … la biographie est je pense un travail de longue haleine, il faut être patient, expliquer le pourquoi, dans quel but, pour « déverrouiller » la pensée. C’est ce que j’essaie de faire … aussi difficile que ça soit, c’est aussi une belle leçon d’humanité … Si on craint d’être jugé, alors on peut peut-être faire une préface en expliquant le pourquoi de ce livre … ça peut aider à « dédramatiser » certains passages (c’est juste une suggestion) …
merci de cet article bien documenté.
J’ai moi-même écrit mes mémoires, toute seule, je pense en effet que ça permet d’avoir un regard extérieur sur les évènements de sa vie, particulièrement ceux qui ont été très douloureux. L’obligation de mettre des mots sur les maux qu’on relate aide à relativiser et à recommencer à voir le verre à moitié plein. ça m’a permis aussi de me juger autrement, quelquefois de me voter des circonstances atténuantes, ça m’a redonné de la confiance en moi. Il faut écrire avec le maximum d’honnêteté, sans se culpabiliser de quoi que ce soit, ce qu’on a fait à une époque était le résultat d’un état d’esprit donné, dans un contexte donné, on a fait pour le mieux, et même si aujourd’hui on sait qu’on n’aurait pas agi de la même façon il ne faut rien regretter.
J’ai terminé mon récit en essayant de répondre aux questions telles que : qu’est-ce qui m’a construite ? que m’ont apporté mes parents sur le plan des valeurs ? qu’ai je apporté à mes enfants ? comment j’envisage ma future vieillesse, ma mort ? mon testament spirituel.
j’ai curieusement été très détendue ensuite, comme si j’avais préparé ma transmission. J’ai deux livres qui attendent que je sois prête à les donner à mes filles, et qu’elles soient prêtes à le recevoir aussi.
Bonjour,
Merci pour ce message très détaillé. Je pense effectivement qu’il faut relativiser (un état d’esprit, un contexte, une époque …) et ne pas se culpabiliser.
Je pense aussi comme vous qu’il ne suffit pas d’être prêt à livrer son récit à ses enfants, encore faut-il qu’ils soient prêts à les revoir !
Merci encore pour votre participation en espérant que d’autres lecteurs réagiront à vos propos.
Patrick
Pour rebondir sur ce que dit Agathe, oui je pense aussi qu’il faut réfléchir à pourquoi on a envie d’écrire, ce qu’on en attend, et faire une introduction qui explique la démarche.
Il ne faut surtout pas le faire pour régler des comptes quels qu’ils soient.
Bonjour, et merci pour cet intéressant tour d’horizon (que je découvre près d’un an après sa publication, mais peu importe !).
J’ajouterais ceci, appris au fil du temps : la nécessité, pour les enfants ou petits-enfants, de s’interroger sur leur désir d’offrir une biographie à un parent. Parce qu’il est toujours préférable d’y voir clair en soi, mais aussi pour mieux communiquer avec ce parent (d’une manière générale et dans le cadre de cette biographie). Qu’en pensez-vous ?
Bonjour Hélène,
Je ne l’utilise pas souvent mais je trouve que votre expression « voir clair en soi » est on ne peut plus juste. C’est vraiment un des bienfaits de l’écriture d’une autobiographie.
D’autre part, mieux connaître un parent, c’est aussi pouvoir mieux communiquer avec lui. Je partage entièrement votre avis.
Je vois que vous exercez le métier de biographe, bienvenue sur ce site où nous pouvons partager aussi entre collègues.
Merci pour votre participation et à bientôt.
Patrick